Le Chateau Labat

Maison noble d’Estos

Dans les dernières années du règne d’Henri IV, habitait à la cour de Paris un jeune colonel né en Béarn, qui avait suivi le roi dans les batailles acharnées entre catholiques et protestants.
Il semblait singulier que ce colonel de 28 ans, possédant sa maison de famille dans le pays le plus protestant de France et étant lui-même un très fidèle catholique fût au service d’un roi qui changeait de religion avec autant de facilité que de favorites.

La raison était qu’Henri IV déploya tant d’astuce et d’habileté, en bon béarnais, pour s’attirer ses vassaux et les obliger à aider ses plans de gouvernement que, subjugués par ce monarque vaillant et généreux, catholiques et protestants l’aidèrent à assurer sa couronne

Après le meurtre du roi par le fanatique Ravaillac, son compatriote demanda la retraite ;
il obtint de la mère de Louis XIII une pension et le titre de maire avec juridiction civile et criminelle, et s’installa dans le domaine d’Estos, près d’Oloron, où était l’ancienne demeure de famille. Ce noble monsieur s’appelait Marcel de Capdepon d’Estos. Ses ancêtres avaient résisté bravement aux menaces et rigueurs que Jeanne d’Albret, mère d’Henri IV, déploya sans scrupules pour convertir au protestan-tisme la Navarre française. Et c’est pour cette raison qu’on montrait le colonel sur la façade de sa maison, gravé en marbre sur un écusson, avec “un lion dans l’attitude de se lancer sur sa proie, couronné par trois étoiles”. Le petit château seigneurial avait un jardin spacieux avec un vaste potager ; les descendants y habitèrent pacifiquement jusqu’à la révolution

C’est dans le château Labat, (en béarnais “labat” signifie “vallée”) qu’on désigne aussi château de Mauco, (dont la traduction littérale est “sale coin”) que Jéliote passa ses derniers jours après avoir quitté sa maison d’Oloron. L’ancienne chapelle où repose le chanteur est devenue l’église du village
Jean-Pierre Mauco, neveu de Jéliote, avait en 1768 épousé sa nièce Thérèse de Fondeire, fille de sa plus jeune soeur, Marie-Anne Jéliote, qui elle-même s’était mariée en 1748 avec Arnaud de Fondeire, notaire à Arudy, qui devint plus tard contrôleur des fermes en Béarn. Les deux jeunes gens, étant parents, avaient dû obtenir une dispense pour leur mariage. Jean-Pierre Mauco (ou plutôt de Mauco) avait été admis aux Etats de Béarn le 4 mai 1761, comme seigneur de la maison noble de Labat d’Estos et héritier de son père, qui avait fait en 1736 l’acquisition de ce fief et du château qui en portait le nom ; il fut maire d’Oloron de 1783 à 1789, puis, de 1793 à 1795 (sauf du 1er novembre 1793 au 19 août 1794 où il fut incarcéré), et plus tard, de l’an VIII à 1807, il fut membre du conseil général des Basses Pyrénées, renommées Pyrénées-Atlantiques par décret en 1969.

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Jéliotte

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Tableau dit « le thé à l’anglaise » huile sur toile de Michel-Barthélémy Olivier – Châteaux de Versailles et de Trianon

Jéliote à la guitare, Mozart au piano lors de la réception du prince de Conti dans le salon des quatre glaces au palais du Temple à Paris

On l’appelle Pierre Jéliote, mais nous n’allons pas ouvrir à nouveau la bataille de l’orthographe, car l’on écrit : Jéliote, Jéliot, Jélyotte, Jéliotte…etc… C’est en effet le nom de la propriété familiale à Lasseube où il naquit le 13 août 1713 de Joseph de Grichou et de Magdeleine née Mauco

Son vrai nom c’est donc Grichou ! le chanteur favori de la Pompadour devint l’artiste n° 1 de Louis XV. Il eut droit à un socle et à une statue de bronze au Parc Beaumont à Pau, mais il ne reste que le socle, car durant la guerre 39-45, on ne se contentait pas d’expédier dans les camps d’Allemagne les résistants, les travailleurs, mais on y envoyait aussi les statues de métal pour forger l’acier ou le bronze victorieux !

Ce Jéliote (tant pis pour Grichou !), accompagné de son ami Lasseubois Joseph Lacassaigne partit jeune à la maîtrise de Bétharram. Après 4 ans d’études, le voilà à Toulouse à la chorale de Saint-Etienne ; il étonne avec “ses accents dont l’aisé Jéliote a su charmer nos sens” , comme l’écrira Voltaire. Sa très belle voix de haute-contre le fit appeler à Paris en 1733 par le Prince de Carignan, inspecteur général de l’Opéra, et en quelques tours de chant, Jéliote devient “Roi de l’Opéra”

Louis XV le considère comme son “chanteur de prédilection”. Jéliote introduit la langue béarnaise à la Cour du Roi. On y écoute le béarnais des romances de Despourrins et certaines dames de la Cour ne rêvent que de bergers pyrénéens, si amoureux et si tendres.Elles voulaient voir “là haüt sus las mountagnes û pastous malurous, segut au pè d’u hau, bagnat de plous…” (là haut sur les montagnes, un berger malheureux, assis au pied d’un hêtre, inondé de pleurs)

De la Cour à Estos

Sa voix lyrique lui permet de créer de nombreux opéras de Rameau, Mondoville, Gretry, Gluck…(les Indes galantes, Dardanus, Zaïs, Zoroastre, Acanthe et Céphise, Daphnis et Alcimadure et aussi le Devin du village de Jean-Jacques Rousseau) Malgré ses triomphes en 1753, il n’avait que 40 ans, Jéliotte réclama sa retraite ; ce fut une levée de boucliers et il resta le professeur de chant des filles de Louis XV jusqu’en 1765. Il jouait fort bien du luth, écrivait des chansons charmantes, qu’il chantait en s’accompagnant lui-même, et, en 1745, il fut chargé de composer la musique d’un opéra-ballet, Zélisca, représenté à Versailles, au mariage du Dauphin, père de Louis XVI. Pierre Jeliote – plaque

Il fit bâtir à Oloron à l’angle de la route de Pau et sur la place du Marcadet, un bel hôtel, puis s’isola à Estos au château de Labat où il mourut à l’âge de 84 ans. Il est enterré dans l’église d’Estos

C’est en 1901 que fut inaugurée à Pau la statue de bronze, déportée en 1942 pour les besoins des nazis. Elle était l’oeuvre du sculpteur Paul Ducuing

Pour expliquer aux Palois le départ de ce bronze, on indiqua qu’elle était “déboulonnée et envoyée à la refonte, pour être trop disgracieuse et pas assez représentative”. Et le socle demeure vide, car même après la Libération, elle n’a jamais repris sa place.

Le Port

 

Aux confins d’Estos et d’Oloron, le “Chemin de la mâture”, rue Navarrot pont sur l’Escou, immédiatement après un chemin perpendiculaire sur la gauche, qui débouche pas très loin : un panneau “chemin de la mâture”
Il a été trouvé des vestiges sous la forme d’un mur maçonné à moitié enfoui, approximativement dans le prolongement du chemin de la mâture : vestiges du port pour la construction des radeaux avec les mâts provenant de la vallée d’Ossau, qui ont succédé à la mâture d’Aspe
Le gave d’Ossau n’était pas radelable. On a essayé de le radeler, avec des paysans “à la touche”, c’est-à-dire qu’ils repoussaient le bois vers le centre ; cela abîmait beaucoup les troncs, qui, en outre, se coinçaient dans les prises d’eau des moulins
Comme on ne peut pas radeler sur le gave d’Ossau, le bois des forêts de Gabas était acheminé par route : une vieille route a été recreusée par le Hourat au sud de Laruns (aujourd’hui il y a une nouvelle route construite au milieu du XIXe s par les Eaux – Chaudes) Il y avait plus à l’ouest une route plus ancienne, qui a été reprofilée vers 1770 ; une côte monte et descend jusqu’à la centrale électrique de Laruns

On a refait la route Laruns-Herrère, d’où l’on rejoignait la nouvelle route de Pau ouverte par d’Etigny 
On traversait Oloron : ils ont dû reprofiler la rue Navarrot (rue des Maisons neuves à l’époque) : le chemin de la mâture et le port d’Estos
Il y a encore les restes de la cabane de la mâture, qui servait d’auberge pour les radeleurs ; c’est une ruine couverte de végétation
Pour la mâture d’Aspe, le port était Athas – Athas – Navarrenx ; puis une nouvelle équipe prenait les radeaux jusqu’à Peyrehorade puis Peyrehorade – Bayonne
Jéliote a participé financièrement à la mâture (il plaçait son argent dans “le bois d’ébène” et la mâture)